« J’aurai 65 ans très bientôt. C’est un peu un choix de vie, a-t-il confié en entrevue en indiquant qu’il quittera officiellement ses fonctions en avril. Ce n’est pas mauvais, après 24 ans, d’avoir une autre direction pour poursuivre le travail et sans doute changer certaines choses, mais surtout pour poursuivre le projet de musée [d’art et société] qui est bien sur les rails. »
Certes, Marcel Blouin aurait aimé porter le projet du Musée d’art et société – son bébé – jusqu’au bout, soit jusqu’à son inauguration en l’église du Précieux-Sang, mais il passera finalement le flambeau à quelqu’un d’autre pour continuer cette transition d’Expression vers un musée.
« Si le projet était sur le point d’aboutir dans six mois ou un an, je resterais, mais ça va être plus long que ça, a-t-il affirmé. Ceci dit, je suis confiant qu’il va se réaliser. Il y a trop d’instances et de gens impliqués là-dedans maintenant. Il y a une belle volonté municipale de le faire aussi. À quel rythme, c’est plutôt ça la question. »
Marcel Blouin est le directeur général d’Expression depuis 2001. Sous sa gouverne, plus de 100 expositions ont été présentées, incluant celles de la triennale ORANGE.
Auparavant, il avait œuvré plus d’une quinzaine d’années à Montréal dans le milieu de la photographie, fondant notamment le magazine Ciel variable, le centre d’artistes VOX et le Mois de la photo de Montréal (qui porte dorénavant le nom Momenta).
« C’est quarante ans de direction d’organismes sans but lucratif dans le milieu culturel et artistique sur lesquels je vais tourner la page », a souligné le natif de Saint-Barnabé-Sud.
Lorsque l’opportunité à la direction générale d’Expression s’est présentée à lui, M. Blouin avait le désir de revenir en région. Il avait une jeune famille et souhaitait « sortir de Montréal ».
« Quand je suis arrivé ici, je me disais que j’allais rester environ dix ans. Finalement, mes enfants sont repartis, mais moi je suis resté. Je pense que ça dénote que j’avais un attachement », a-t-il dit en souriant.
« À Montréal, la notion d’appartenance n’est pas très forte. Tu ne rencontreras jamais le maire. Tu fais des activités, mais tu es un peu dans ta bulle, a-t-il poursuivi. À Saint-Hyacinthe, c’est un aspect que j’aimais. Tu es lié à l’entièreté des activités de la ville. Tu fais partie d’un tout. »
Au fil des ans, M. Blouin a amené Expression à grandir. Le centre d’exposition a triplé son nombre d’employés, passant de trois à dix, et il est devenu une institution muséale agréée par le gouvernement du Québec en 2019. « C’est une chose dont je suis fier, d’avoir obtenu l’agrément », a souligné le DG.
Ce pan de carrière à Expression a néanmoins comporté son lot de défis. « Je dois avouer que ça n’a pas toujours été facile de tenir la barre de ce centre d’art contemporain à Saint-Hyacinthe avec les exigences des trois paliers gouvernementaux : municipal, provincial et fédéral [pour l’accès à du financement]. Je me suis posé bien des questions, je me suis parfois buté à des obstacles, mais en général, ce fut fort stimulant. »
Un legs important laissé par Marcel Blouin sera sans contredit le Musée d’art et société, un projet qu’il a rêvé pendant de nombreuses années et pour lequel il a consacré énormément d’énergie, tout comme le pôle culturel dont le musée fera partie aux côtés de la bibliothèque T.-A.-St-Germain et du Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe.
« Je pense que j’ai contribué beaucoup à la fois au musée et au pôle culturel, a-t-il relaté bien humblement. J’y ai peut-être même mis un peu trop d’énergies selon certaines personnes, mais je pense que c’était la bonne chose à faire. Souvent, pour les projets de musée comme ça, quelqu’un est délégué pour le faire, ce n’est pas la direction de l’organisme qui gère ça. Je gère les activités courantes d’Expression et d’ORANGE et on s’est donné ce défi-là de doter Saint- Hyacinthe d’un musée. Je n’en aurais peut-être pas fait autant dans une autre ville. »
Assurément, le fait de savoir qu’il ne sera plus en poste pour l’ouverture du futur musée lui fait un petit pincement au cœur, mais il s’était déjà fait à l’idée.
« J’en ai fait mon deuil il y a quelques années déjà. Je voyais la manière dont les choses évoluaient, a-t-il laissé tomber. C’est sûr que comme individu, j’aurais aimé ça, mais je l’avais compris depuis un petit bout [que je ne serais plus en poste pour l’inauguration du musée]. Qu’un musée prenne deux ans, trois ans ou cinq ans de plus à ouvrir, peu importe, car en général, une fois qu’un musée est ouvert, il ne ferme plus. On n’ouvre pas un musée pour dix ans, on l’ouvre de façon définitive, pour toujours. »
Après quarante ans de direction d’organismes culturels, le temps était venu pour Marcel Blouin « d’enlever le packsac ». Mais l’heure de la retraite ne semble pas avoir sonné pour autant pour le Maskoutain.
« Je veux continuer de faire des choses, mais qui ont un début et une fin, [des projets qui seront] plus sur des bases contractuelles, a-t-il mentionné. C’est difficile pour moi de ne rien faire. J’ai quelques idées et on m’a suggéré des choses, mais je vais prendre une pause dans un premier temps et voir dans quoi je me lance ensuite. »
Pour succéder à Marcel Blouin, Expression a lancé à la fin de l’été un appel de candidatures pour pourvoir le poste de directeur général. Les personnes intéressées avaient jusqu’au 31 octobre pour soumettre leur candidature en vue d’une entrée en poste en avril. Pour l’heure, aucune embauche n’a été réalisée.